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Les théories de l'apprentissage

Dernière mise à jour : 19 févr. 2024

Les théories de l’apprentissage

Par Sophie RANGAN – Avril 2020 – 10 mn


L’apprentissage est un processus d’acquisition de connaissances, d’habiletés, de valeurs et d’attitudes rendus possible par l’étude, l’enseignement ou l’expérience ; l’objectif étant l’acquisition ou la modification des représentations de la personne avec son environnement.

En résumé, l’apprentissage se définit donc en tant que changement relativement stable de la conduite d’un individu en raison de l’expérience. Ce changement survient de l’établissement d’associations entre simulations et réponses.


La littérature sur l'apprentissage offre de nombreuses théories et modèles d'apprentissage.


A l'intérieur de chaque théorie ou modèle, se distingue l'importance accordée au sujet et aux situations lors du changement de comportement et la construction de ce nouveau comportement.


Une réflexion sur la pratique didactique ne peut faire l’impasse sur les modèles qui décrivent les processus selon lesquels la personne construit ses connaissances et s’approprie ses savoirs.

Voici quelques-uns des principaux courants théoriques ayant donné lieu à des modalités de pratiques pédagogiques :


  • Béhaviorisme

  • Constructivisme

  • Socio-constructivisme

  • Cognitif


Voici une définition simplifiée des quatre grandes visions sur les théories de l’apprentissage :

  • Apprendre c’est transmettre des savoirs, en renforçant des comportements (le béhaviorisme) ;

  • Apprendre c’est construire des images de la réalité dans des situations d’action (le constructivisme) ;

  • Apprendre c’est échanger du sens, dans des rapports sociaux (le socio-constructivisme) ;

  • Apprendre c’est traiter de l’information, par les mécanismes mentaux internes constitutifs de la pensée et de l’action (le cognitivisme).

Les principales théories sur l’apprentissage sont issues de recherches des grands chercheurs reconnus tels que Pavlov (1846-1936), Vygotsky (1896-1934), Piaget (1896-1980), Bandura (1925) et bien d’autres encore.

Ces recherches ont été effectuées principalement sur les enfants du fait que la formation pour adultes en France a été valorisée après la Loi de 1970 sur le développement des compétences. Néanmoins, elles s’appliquent aussi à l’adulte car le processus d’apprentissage est le même.


"Comment l’apprentissage se construit, dans quel contexte … " fait toujours l’objet de nombreuses recherches mais c’est grâce à toutes ces découvertes que la formation a progressé, progresse et progressera encore demain.


1. Le behaviorisme – "Apprendre c’est transmettre"


Historiquement, c’est le modèle transmissif qui vient en premier. L’apprenant était considéré comme une boîte vide à remplir, le savoir était extérieur donc pas lié à la personne, à son environnement et à ses expériences.

L’objectif du maître était de transmettre sur un mode cumulatif, son rôle était de dire et de montrer, celui de l’élève de mémoriser et de redire.

L’élève est dans son métier d’élève lorsqu’il se conforme à ce qu’il pense être l’attente du maître : " être attentif, écouter, suivre, imiter, répéter et appliquer ".


Le béhaviorisme est la première grande théorie de l'apprentissage qui a fortement marqué les domaines de l'enseignement, de l'éducation et de la formation. Le terme « béhaviorisme » a été créé à partir du mot anglais "behavior" qui signifie "comportement".

Le béhaviorisme définit l'apprentissage comme une modification du comportement provoquée par les stimuli venant de l'environnement.

On doit à Skinner (1904-1990), père du Béhaviorisme, la première inflexion de ce modèle.

L’apprentissage se fait par paliers successifs, le passage d’un niveau à un autre se faisant par renforcement positif des réponses justes et des comportements que le maître souhaite valoriser. Il "suffit" de proposer des paliers dont l’écart n’est pas trop important pour rendre possible l’apprentissage, par réduction du nombre des fautes. Le rôle du maître est là encore essentiel, pour le guidage des apprenants et leur valorisation.


De plus, il affirme que l'apprentissage peut être obtenu par l'utilisation de récompenses appelées "renforcements positifs" (ex. : des bonnes notes chez les élèves) et de punitions appelées "renforcements négatifs" (ex. : des mauvaises notes chez l'élève.).


C'est dans ce sens que l'individu adopte un comportement lui permettant d'éviter les renforcements négatifs et d'augmenter la chance d'obtenir les renforcements positifs.

Cette procédure est appelée "conditionnement opérant".


Skinner a critiqué sérieusement l'enseignement traditionnel fondé essentiellement sur des renforcements négatifs et a proposé de remplacer ceux-ci par des renforcements positifs. Ce modèle se base sur les principes suivants :

  • La matière à enseigner est découpée en une série d'éléments courts pour permettre un renforcement le plus rapide possible,

  • Le contenu part du niveau le plus simple et le niveau de difficulté augmente de manière graduelle afin de favoriser un apprentissage sans erreur,

  • Le contenu est présenté sous forme d'une séquence linéaire mais chacun peut la faire à son propre rythme, ce qui va dans le sens d'une individualisation de l'enseignement,

  • Les renforcements positifs (à travers des encouragements, etc.) sont favorisés et doivent être donnés le plus rapidement possible

La force du béhaviorisme était de proposer une théorie complète de l'apprentissage :

"Apprendre c'est devenir capable de donner la réponse adéquate, c'est encore construire un comportement adapté à un environnement".


Les limites du modèle par ses principes méthodologiques sont :

  • La passivité des apprenants,

  • L’enseignant reste l’acteur principal,

  • L’enseignement des contenus en dehors de contextes significatifs pour l’apprenant.


Ces deux premiers modèles ont fait l’objet du même type de remise en cause qui a conduit à proposer une conception de l’apprentissage où le sujet apprenant tient la première place en ce qu’il construit ses savoirs, leur modalité d’appropriation et la possibilité de les utiliser à bon escient.

Cependant, la formation a gardé du Béhaviorisme les renforts positifs par l’encouragement, séquencer la formation par séance en construisant les savoirs par palier de niveau de difficulté. En effet, faire trop difficile conduirait le sujet en situation d’échec, sachant que pour progresser, l’apprenant à besoin d’avoir le sentiment d’auto-efficacité dont parle Bandura.


2. Le constructivisme – « Apprendre c’est construire »


PIAGET (1936-1975) est un des grands théoriciens du constructivisme. Pour lui, apprendre c'est construire des connaissances au cours de son développement. Cette construction suppose que chaque sujet acquiert des outils conceptuels (mentaux) qui lui permettent de comprendre le monde dans lequel il est et de se l’approprier.

  • C'est parce que l'homme est actif qu'il acquiert des connaissances ;

  • Elles se construisent par ceux qui apprennent ;

  • La connaissance ne procède pas d’une perception mais d’une action ;

  • L’acte de connaître un "objet" est inséparable de l’acte de "se" connaître qu’exerce le sujet connaissant ;

  • En "organisant le monde" (c’est à dire les connaissances), l’intelligence (c’est à dire le mode d’élaboration de la connaissances), s’organise elle-même.

En psychopédagogie, Piaget a étudié les phases du développement cognitif de l’enfant, développement qui a toujours lieu dans l’interaction entre l’individu et son milieu, entre l’inné et l’acquis.

Dans l’apprentissage il faut donc se placer dans des situations actives pour rencontrer et résoudre des problèmes sources d’apprentissage. Des conflits internes (conflit socio-cognitif) se mettent en place du fait que l’apprenant doit intégrer de nouveaux savoirs qui peuvent rentrer en conflit avec ses propres savoirs. De ce fait, il fait face à une double adaptation : soit par une simple assimilation (l’individu trie et sélectionne ce qui est conforme à ses schémas, il décode avec ses connaissances initiales), soit par une accommodation (les nouvelles connaissances élargissent les structures existantes en créant un nouveau schéma d’assimilation).

Un équilibre de ces deux processus mène à acquérir de nouvelles connaissances, d’obtenir des stades supérieurs de structuration cognitive.

L’erreur est alors le moment d’un apprentissage en cours d’élaboration et fait l’objet d’une attention spécifique du formateur, dont le rôle est alors de mettre en place des situations permettant à l’apprenant ce travail de modification de ses représentations lui permettant d’intégrer des schémas nouveaux et de modifier sa structure cognitive supérieure (connaissances, raisonnement logique, jugement moral, esthétique).

Schéma du modèle de Piaget

Grâce à Piaget, la formation d’aujourd’hui s’est enrichie de savoirs importants sur le processus cognitif de l’apprentissage. De plus, il intègre l’environnement avec les situations actives pour apprendre.

Le constructivisme tout comme le socioconstructivisme ont fait émerger la notion du conflit socio-cognitif qui permet l’apprentissage. Sans conflit, pas d’assimilation, ni accommodation et équilibration donc pas d’apprentissage car "Apprendre, c’est bouger ses représentations".

Contextualiser (apprendre), décontextualiser (désapprendre), recontextualiser (réapprendre) pour bouger ses représentations est un travail difficile et fatigant pour le sujet qui apprend.


3. Le socioconstructivisme « Apprendre c’est échanger »


L'approche socioconstructivisme appelée aussi sociocognitive, introduit des interactions, des échanges, du travail de verbalisation, de construction et de co-élaboration.

Cette approche est basée sur le modèle social de l'apprentissage, développé essentiellement par les psychologues sociaux et les psychologues du développement social.

Dans cette théorie développée principalement par Vygotsky, psychologue russe, l'apprentissage est considéré comme le résultat d’activités sociocognitives liées aux échanges didactiques entre formateur/apprenant et apprenant/apprenant.

Le concept d'une construction sociale de l'intelligence est la continuité d'une auto-socio construction des connaissances par ceux qui apprennent.

Les conditions de mise en activité des apprenants sont indispensables dans le cadre des modèles socioconstructivistes. L’apprentissage n'est plus, seulement, ce que le formateur transmet et les formes de mise en activité des apprenants, mais l'apprentissage est aussi la mise en interactivité entre apprenants, entre formateur et apprenants. C'est à partir de cela que le savoir se construit.

Vygotsky met en avant le rôle de la culture dans l'apprentissage. Son hypothèse centrale est "le fonctionnement fondamentalement social de l'être humain".

Dans son approche historico-culturelle, il affirme que l'homme est un acteur culturel et social et qu’il se développe grâce au processus social et historique.


Pour cet auteur, "la vraie direction du développement ne va pas de l'individuel au social, mais du social à l'individuel". C'est l'apprentissage qui "tire" le développement. Vygotsky affirme que "les recherches montrent incontestablement (...) que ce que le sujet sait faire aujourd'hui en collaboration, il saura le faire tout seul demain » et parle alors de "zone proche de développement " (ZPD) pour décrire les fonctions en maturation.

Vygotsky définit la zone proche de développement comme la distance entre deux niveaux :

  • Celui du développement actuel, mesuré par la capacité qu'a le sujet de résoudre seul des problèmes, et

  • Le niveau de développement mesuré par la capacité qu'a le sujet de résoudre des problèmes lorsqu'il est aidé par quelqu'un. Apprendre revient alors à former une zone proche de développement.


La théorie de Vygotsky met l'accent sur la coopération sociale parce qu'elle permet au sujet de développer plusieurs fonctions intellectuelles : l'attention volontaire, la mémoire logique, l'abstraction, l'habileté à comparer et différencier.

En résumé, l'apprentissage ne coïncide pas avec le développement, mais active le développement mental du sujet, en réveillant les processus évolutifs qui ne pourraient être actualisés sans lui, grâce à la médiation socioculturelle.

La zone proche de développement a une caractéristique spéciale : elle est sociale et culturelle. Par exemple, le sujet qui apprend à utiliser l'ordinateur, l'utilisera comme le professeur d'informatique lui a montré et comme les autres apprenants l'utilisent. Le comportement est déterminé par le contexte de l'apprentissage. En apprenant, le sujet imite aussi les autres. Ce qui constitue un processus d'apprentissage social et culturel.


Il ouvre aussi la voie aux fructueuses recherches sur le conflit socio-cognitif, confrontation des représentations que deux ou plusieurs sujets ont sur un même objet d’investigation, ou d’un seul sujet mis face à une remise en cause de ses propres représentations.

Le constructivisme comme le socioconstructivisme sont depuis des années les modèles de référence dans la formation. Vygotsky dans sa théorie partagée par de nombreux formateurs démontre la dimension fondamentale des interactions dans le groupe pour tout apprentissage, d’où cette citation reprise souvent en formation « On apprend avec et par l’autre ».

C’est pour cette raison que l’émergence de la formation uniquement à distance (Mooc, Spoc, e-learning) pose question dans la communauté des formateurs. En effet, l’absence d’interactions dans le groupe questionne sur les points suivants :

  • Comment apprendre seul, sans la stimulation du groupe ?

  • Les forums et quizz sont-ils suffisants ?

  • Que peut-on retenir des apprentissages ?

  • Le conflit socio-cognitif, est-il possible ?

  • "Apprendre, c’est bouger ses représentations", peut-on les bouger uniquement en ligne ?

  • …..


C’est pour ces raisons que les puristes de la formation préfèrent le Blend-Learning qui permet par l’alternance entre le e-learning et le présentiel, de garder les échanges entre personnes qui sont essentielles pour apprendre.

En général, on se souvient mieux d’une situation de groupe que d’un cours en ligne.

4. Le cognitiviste - Apprendre c’est traiter de l’information


Le cognitivisme s’est développé au même moment que l’informatique, avec l’idée qu’un comportement intelligent peut se représenter sur la base d’un langage formel permettant la manipulation de symboles.

Cependant, la mode du « tout neuro- » qui envahit actuellement ce courant, définissant l’être humain comme une vaste centrale de traitement de l’information (l’information processing model anglo-saxon), tend à nier toute dimension humaine de la personne.

Ce modèle informatique, « computationnel », de l’activité cognitive se voit d’ailleurs battu en brèche par un cognitivisme connexionniste qui remet en cause l’analogie cerveau-ordinateur pour lui préférer une conception selon laquelle « le monde tel que nous le percevons dépend de celui qui le perçoit ».

Si cette vision s’est surtout appuyée au départ sur les modèles de comportements de la psychologie cognitive, elle cherche aujourd’hui à se légitimer par les apports des neurosciences ou certains apports de l’Intelligence Artificielle dite « symbolique ».

Ce dernier modèle ne met pas tout le monde d’accord, posant de nombreuses questions et il est source de nombreux débats et controverses.


Pour conclure, il est intéressant de se questionner sur « Comment on apprend ? ». Bien que nous ayons de nombreuses modalités pédagogiques pour former que ce soit en présentiel ou distanciel, les nombreuses recherches faites en formation nous aident sur plusieurs aspects. Faire progresser nos pratiques en tant que formateur/trice pour devenir un facilitateur sur le développement des compétences. Puis en tant qu’accompagnant, nous donner des pistes de réflexion pour qu’une formation « Marche», innover en permanence sur nos méthodes de formation afin que celles-ci produisent des changements concrets sur les sujets en situation de travail.

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